J’entre. Le noir m’accueille et m’enveloppe. Je suis surpris de la petite taille de la scène, décalée par rapport à l’idée que je m’en faisais. Le spectacle commence. Deux rangées de chaises se font face. Ils sont onze, dont le chorégraphe lui-même. Ils sont de plusieurs générations, venues de différents pays. Des professionnels côtoient des amateurs. Ils ont tous une histoire singulière. Démarre alors un travail de tissage, de liens, par le corps, le texte et le chant. Je pense à Pina Bauch avec son chef d’œuvre « Kontakthof » vu en avril dernier; je repense au fabuleux « Trois Générations » de Gallotta présenté en 2004. Je revois la si mauvaise pièce « After / Before » de Pascal Rambert. Mes références acquises depuis huit ans se bousculent. Je n’arrive pas à entrer ; des images se télescopent. Je compare. Je hiérarchise. Je m’enferme. Ils dansent et moi je réfléchis à toute autre chose. Je ne vois rien comme si j’étais à côté alors que je suis installé au centre ! Je suis dans une telle position d’observateur qu’il m’est impossible de laisser venir mes sensations. "Tout cela, c’est du déjà vu", me dis-je.
Malgré tout, Jean-Claude Gallotta arrive à m’énerver avec ses gestes, sa voix posée sur une excellente musique rock, son bonnet sur la tête, comme si je ne supportais pas son intrusion dans l’espace des danseurs. Il y a deux moments qui vont m’aider à lâcher : une vidéo où l’on voit Henry Miller sur son lit de mort en train de nous parler de la vie puis une danse à quatre où un homme et trois femmes tissent de tels liens que la forme de leur quatuor touche le sublime. Mais je ne tiens pas sur la durée. Je m’enferme à nouveau et l’ovation du public me laisse cloué, presque tétanisé par les cris de fans venus du fond de la salle. Mon voisin de droite qui n’a cessé de regarder sa montre par ennui se lève pour manifester sa joie. Je quitte le théâtre, dépité. Je n’ai pas trouvé ma place de spectateur – blogueur dans ce lieu institutionnalisé (le centre chorégraphique national d’Aix en Provence recevait ce soir celui de Grenoble). J’ai touché mes limites et « Des gens qui dansent » n’ont rien pu faire. Avec le Pavillon Noir, on nous promet « un lieu pour la danse ». Il serait peut-être temps que j’y entre.
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Assis dans la salle bien peu accueillante de l’Espace Julien de Marseille, nous voyons arriver sur scène un homme fermé, dont on ne voit pas les yeux, replié sur lui-même. Il prend sa guitare, que son corps entoure, et qui lui donnera sens, énergie. Dès les premières notes, nous le reconnaissons ; mais nous ne le rencontrons pas encore. Nous commençons à entrer dans son univers musical. Puis sa voix, sensuelle, chaleureuse, en totale dissonance avec son physique. Je tente de prendre mes marques, sous le choc encore de ce mal-être. Je ne sens pas le public, très statique, qui ne se permet rien, respectueux de sa réclusion. Murat n’est pas avec nous, il ne donne pas de vie à la salle, il ne semble rien attendre de nous, je me demande ce que cela signifie de venir le voir en concert. Pourtant, il nous donne beaucoup de poésie, emplie de douleur. Ses textes sont forts, ils nous parlent de son rapport à la nature, de ses rapports avec ceux qu’il aime : ses sensations, ses émotions liées à son environnement sont constamment mises en parallèle avec ses relations avec les autres, il aime, il souffre d’aimer, la nature l’apaise ou traduit ses émotions.
Je t’écris pour te recommander laCompagnie des Transe-mutants que j’ai récemment vu danser au Théâtre de Saint Malo.



Elle nous regarde, prend une carabine, prête à la diriger vers nous. D’un mouvement gracieux, elle pointe son engin vers le plafond et tire. Une statuette religieuse tombe à terre. Ouf, nous sommes sauvés. Sofia Asensio, danseuse venue de Barcelone, peut commencer à « étudier les mystères de la sainteté » à partir d’un personnage ignorant, qu’elle incarne, « c’est-à-dire quelqu’un qui croit encore aux mystères ».
En arrivant, je ressens comme un décalage entre les dorures de ce théâtre à l’italienne et le jazz, entre ce public un peu « guindé » et l’énergie communicative de la musique de Manu Katché. Assis, je suis coincé entre deux aimables cadres cravatés et une barre en fer qui me coupe la vision de la scène. Je reste à l’étroit tout au long du concert comme s’il était impossible de s’affranchir de ce cadre.
Il y a des soirées où Le Tadorne doit s’accrocher à son siège pour ne pas voler dans les plumes. Certains « chorégraphes » ont semblent-ils pris le parti de se faire plaisir au détriment de l’art qu’ils sont censés servir. « La surface de divagation » de Montaine Chevalier et d’Elodie Moirenc présentée dans le cadre du festival « Dansem » à Marseille est de ces oeuvres que je préfère enterrer au plus vite. Cinquante-cinq minutes de divagation artistique qui auraient pu être un beau spectacle si ses concepteurs n’en avaient oublié le sens. Pourtant, le premier tableau est de toute beauté : un homme joue de la guitare, une femme accroche des lambeaux de plastique sur fond de lumière bleue (hommage sincère à «