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EN COURS DE REFORMATAGE

Held me.

C’est une chorégraphie venue d’ailleurs, de l’autre bout de la planète, d’un pays dont je ne connais pas les habitants. Ce soir, le Théâtre des Salins de Martigues projette d’ouvrir notre regard sur la danse : l’ « Australian Dance Theatre » dirigé par Garry Stewart présente «Held».
En arrivant, je suis interpellé par le dispositif scénique : quatre danseurs (punk ? mauvais garçons et filles d’un quartier underground?) posent pour une photographe dont les clichés sont diffusés sur deux grands écrans amovibles. On se croirait dans une publicité pour l’Oréal.
Ce n’est qu’une apparence. Il faut abandonner de nombreux à priori pour s’autoriser à voir cette chorégraphie aux antipodes de notre culture. « Held » joue précisément sur l’apparence (belle au demeurant), pour nous inviter à passer de l’autre côté. Car tout laisse à penser que cette troupe de onze danseurs nous fait un numéro de voltige censé célébrer le culte du corps, à l’image de ces photos de mode qui polluent nos villes. Or, leur beauté est loin d’être plastique : elle est à chercher dans le regard de la photographe (Loïs Greenfield, superbe par sa présence), médiatrice entre elle et nous, qui nous aide à capter tout au long du spectacle la grâce de leurs gestes aériens (sans elle, que verrions-nous ?).
La beauté se veut complexe quand les danseurs sculptent lentement le groupe:ainsi prend forme un tableau de la renaissance italienne (superbe moment suspendu).
Cette beauté est fragile quand elle s’exprime à partir de mouvements dont on croirait qu’ils émergent d’un jeu vidéo. Ils transforment notre vision pour nous permettre de créer les passerelles entre le son, l’image virtuelle et réelle. En effet, c’est la multiplication de tous ces cadres (photo, peinture, écran vidéo) qui permet au groupe de décupler sa créativité au service du public : « nous vous offrons ces angles de vue, à vous d’en faire ce que vous pouvez » semble dire le collectif !
À l’issue d’une heure palpitante, l’esthétique du corps prend sens parce que loin d’être un spectateur passif, j’ai la sensation d’avoir créé ma vision, ma photo, ma peinture. « Held » est une chorégraphie sans prétention : juste celle d’offrir une magnifique performance quasi futuriste pour spectateurs endurants.


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