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FESTIVAL D'AVIGNON OEUVRES MAJEURES

Boris Charmatz a dit à l’Enfant d’aller jouer dans la Cour…

Quel est le rapport entre le Grand Palais à Paris et celui des Papes en Avignon où se joue «Enfant» du chorégraphe Boris Charmatz ? A priori rien. Sinon, ce soir, une machine extravagante et mécanique qui saisit ce qu’il y a au sol.
«Main Divine» de Boltanski qui choisit les vêtements des adultes et des enfants, «Main  hasardeuse»  qui sélectionne à la Fête foraine les jouets que l’on peut gagner… «Est-ce  la Main de Dieu, est-ce la Main du Diable»…..c’est la Main-Proie qui donnera naissance à La Danse aérienne, la Main qui enfantera le Malheur et l’Enfer….la Main du Bonheur peut-être, la Main de la Victoire de la Jeunesse…la Main de l’Espoir, la Main tentacule de Boris qui balance.
Boris Charmatz a dit à «Enfant» d’aller jouer dans la Cour, mais aussi de faire un tour à la Fête Foraine. Il lui a dit de faire semblant de jouer à la Poupée, d’être le temps d’un instant une chose informe, délaissée à l’autre, de devenir le «corps inanimé avez-vous donc une âme», de s’abandonner pantin désarticulé,  de voir pendant le silence,  l’autre en noir,  pendu à l’envers.
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La musique, c’est le bruit de la machine qui résonne. La machine c’est Work in Progress…Travaux en Cour;.., une autre Pèche Miraculeuse; c’est vrai qu’à un certain moment on croit voir des poissons sans oxygène à la surface d’une eau noire et glacée.
Et puis la Fête Macabre continue avec son escalier qui mène vers les tremblements, les secousses.
Les corps inachevés s’amoncellent pour devenir un magma de jambes et de bras saccadés….
L’Enfant Multiple est déposé un a un par son père, par sa mère, par un autre géniteur, par l’intrus qui en prends soin. On a peur de la dérive.
L’Enfant dort-il à ce moment-là ou est-il ailleurs ?
L’Enfant batracien devient le jouet et on a peur.
Peur de ce que l’on va faire de lui, poupée de cire, poupée de son prédateur.
Les Mouettes arrivent, oiseaux de bon augure…
Mer, vent, chant ils sont bringuebalés, malmenés, adorés aussi.
C’est le Radeau de la Méduse, le naufrage sûrement mais pas encore. Bientôt, on ne sait pas, bientôt on espère le Sauvetage en mer…
C’est un jeu qui commence pour finir par la guerre. Qu’a-t-on fait à l’Enfant. Comment l’a-t-on regardé ?
Les Hommes ont les yeux fermés, l’Enfant des Enfants ouvre les siens.
Ils prennent le pouvoir, deviennent les Enfants Rois, la Cornemuse n’en finit pas d’hurler dans la Cour…
Je crois qu’ils vont commencer à jouer dans la Cour. 
Francis Braun-Le Tadorne.
“Enfant » de Boris Charmatz au Palais des Papes du 7 au 12 juillet 2011.
A lire le regard de Pascal Bély.