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EN COURS DE REFORMATAGE

La Lettonie bouscule nos vieilles habitudes.

J'aime quand le théâtre nous positionne autrement qu'en spectateurs passifs et qu'il bouscule notre rôle et notre regard. En attendant d'entrer dans la grande salle du Théâtre des Salins de Martigues pour « Long Life » d'Alvis Hermanis, j'ai la douce sensation que nous allons vivre un moment particulier. En effet, pour accéder à nos places, nous devons passer sur la scène et avancer dans le décor. Nous sommes dans le couloir d'un immeuble où traînent des objets d'une époque révolue, où des affiches nostalgiques décorent des murs délavés.  Je marche à pas feutrés et l'odeur d'enfermement pose le contexte d'un pays de l'Est (La Letonie) sous la tutelle de son puissant voisin russe. À la fin du parcours, sur la gauche, apparaît la salle. Je m'installe au premier rang, sur la droite. Face à moi, trois appartements qui ne sont séparés d'aucune cloison. Au spectateur d'éviter d'en mettre !
Nous sommes chez les vieux, ceux que l'on ne voit pas beaucoup, encore moins quand ils sont lettons. Ils s'éveillent, un par un. Deux couples, un célibataire. Nous allons passer une journée particulière comme dirait Ettorre Scola. Tout est suggéré, seuls les gestes parlent : la performance est extraordinaire quand on connaît la jeunesse des comédiens ! Le public affronte ces corps et aucun texte ne sert de refuge : nous n'entendrons quasiment jamais un mot de letton.

Pendant une heure trente, ces vieux nous font rire avec leurs obsessions, leurs maladresses, leur tendresse maladroite. Ils n'ont pas d'argent, mais leur créativité est leur richesse. Comment ne pas être époustouflé quand ils créent de la musique électronique avec presque rien ? Comment ne pas être subjugué de les voir créer des bougeoirs avec du plâtre et des préservatifs ? Nous rions, mais le malaise est palpable dans la salle : assistons-nous à un « loft story » théâtral ? Qui regardons-nous ? À mesure que les scènes se succèdent, je ne peux m'empêcher de me voir changer de regard sur eux : de l'indifférence, à la moquerie, à la compassion, à l'admiration face à la force vitale qu'ils dégagent. La mise en scène m'accompagne dans ce changement :   du voyeur au moqueur, de l'étonné à la colère quand arrive les images de la guerre en Irak sur leur chaîne de télévision. Et oui, nous sommes en 2006, dans un pays européen. Nous apprendrons que les retraites de ces vieux ont servi à financer l'entrée de la Lettonie dans l'Union. Alvis Hermanis nous positionne au centre, avec ces vieux, comme s'il opérait un lien de filiation. C'est ainsi que « Long Life » se niche dans nos consciences : nous serons vieux. Quel système alimentons-nous qui exclut petit à petit ce qui n'est plus productif pour répondre à notre soif de consommation ?
Je quitte le Théâtre un peu abasourdi mais heureux d'avoir rajeuni intelligemment.

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EN COURS DE REFORMATAGE

Héla Fattoumi et Eric Lamoureux enlacent.

« Superbe ! ». En quittant le Théâtre d'Arles, je ne peux contenir ma joie en adressant ce compliment au personnel d'accueil . Deux chorégraphes sont entrés dans ma vie de spectateur: Héla Fattoumi et Eric Lamoureux du Centre Chorégraphique National de Caen. Leurs noms portent la musique du métissage, du lien : « hélamoureux »?Je le suis ce soir. Sincèrement. Je viens d'assister à une heure trente d'une danse virtuose, intelligente, raffinée. Je découvre un nouveau langage et les images de leurs corps défilent dans ma tête comme une musique libératoire.
Tout commence par « Entrelacs ». Ils sont quatre danseurs et un accordéoniste. Mes jambes sont lourdes après une semaine de travail épuisante. Je doute de pouvoir tenir. Les premiers instants m'emportent et je sens qu'ils ne pourront rien y faire. Je fais un rêve éveillé. Entre conscience et apesanteur, je ne sais plus où je suis. L'accordéoniste tourne autour d'eux, eux vers lui. C'est enivrant de les voir s'articuler, se fragiliser, danser avec leur bras, oser bouger leurs doigts comme s'ils faisaient des pointes. De quatre, elles ne sont plus que deux à former des figures géométriques que la danse va arrondir. Elles sont remplacées par les deux hommes : à ce moment, l'émotion me gagne. Le danseur s'approche de l'accordéoniste pour l'enlacer : il est son instrument. Les corps deviennent les notes que la musique de leurs liens met en mouvement. Sublime.
L'entracte me permet d'apprécier le Théâtre d'Arles : c'est un havre de paix. Même le violent vent du sud de l'extérieur y trouve refuge en jouant une mélodie enveloppante qui accueille Hélà Fattoumi pour son solo, « Wasla ». Il restera dans les annales du Tadorne (et de la danse contemporaine !). Au commencement, il y a une minuscule alcôve orangée qu'un rayon de lumière fragmente. Elle danse dans ces quelques mètres carrés pour se fondre dans le décor.  Cette femme cherche la lueur émancipatrice pour échapper au pouvoir aliénant des hommes et des religions. Pas à pas, elle s'affranchit de cet espace pour venir vers nous. C'est un hymne à la liberté que seule la danse peut à ce point métaphoriser. Sa fragilité devient sa force ; la musique l'accompagne pour mieux s'effacer au moment où le corps, prêt à flancher, se remet dans un mouvement libératoire. Elle retourne dans son alcôve : elle vient de là. Un instant voilée, elle s'en libère puis, avec ses doigts, elle entame une chorégraphie sur son ventre. On imagine, on entend les griffures. Elles ouvrent enfin la voie.
La danse fera toujours trembler. Même les dictatures.


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OEUVRES MAJEURES

Pippo Delbono, metteur en scène inconscient.

Il règne une ambiance presque festive dans le Hall du Théâtre des Salins de Martigues comme si le public avait conscience d’avoir un rendez-vous amical avec le plus grand metteur en scène italien d’aujourd’hui, Pippo Delbono. Le théâtre est complet pour « Gente Di Plastica »; prêt à exploser. Moi aussi. J’ai envie ce soir de me laisser transporter, de quitter un espace pour en investir un autre, car j’ai confiance en Pippo Delbono. Je vais me lâcher tel un Tadorne posé sur un banc de sable mouvant.
Pippo est là, derrière la vitre, dans une cabine radiophonique. Son micro est rouge comme le nez d’un clown ; il tient ses papiers tel un journaliste qui hurlerait à la face du monde les nouvelles de l’humanité. Sur scène, défile la condition humaine qu’il ancre dans différents contextes (la famille normée à l’américaine, le collectif en quête d’idéaux, la société anglaise
en recherche de liens sociaux). Deux artistes habitent la pièce : Sarah Kane, écrivain britannique (qui s’est suicidée à l’âge de 28 ans) et le guitariste rock contestataire Franck Zappa. À aucun moment, nous n’entendons leurs oeuvres (les descendants de Sarah Kane l’ont interdit). La contrainte est alors une ressource : tout est métaphore, suggéré (les comédiens ne parlent pas) comme si nous devions faire nous-mêmes le lien avec ces deux artistes. Je suis alors un spectateur dont le regard devient kaléidoscopique : il y a la scène, la cabine, et Sarah Kane – Franck Zappa en metteurs en scène. Pippo Delbono nous propose son « tableau » théâtral : tout est en place pour que plusieurs niveaux s’emboîtent.
Sa palette est riche : dénoncer l’époque de l’après-guerre où la croissance économique a modélisé la famille telle une mécanique bien huilée, formaté les relations amicales à partir de faux-semblants suicidaires, marginalisé ceux qui sont différents. La succession des tableaux fait mal (à plusieurs reprises, mon coeur bat comme si j’avais peur) ; la présence du plastique (canapés et ballons) évoque l’enveloppe fragile et décomposable de l’humain. Mais au milieu de ce chaos vient se nicher quelques moments de poésie à partir d’un plastique gonflé à bloc à l’image de  ces  ballons posés sur la tête d’un anglais servant le thé pour un public hilare ; comme ce ballon dans les mains d’un homme trisomique qui joue avec le public où encore cette poupée à l’abandon, jetée à terre par un travesti exorcisant son enfance

Après une heure quarante de rêveries et de cauchemars, Pippo Delbono réussit à incarner le destin tragique de Sarah Kane et insuffler l’énergie de Franck Zappa. Il en fait des figures mythiques (quelle performance !) censées résonner dans nos histoires personnelles et collectives. J’en sors sonné, conscient d’avoir vécu en apesanteur, mais confiant dans ma capacité pour écrire sur le blog («l’inconscient fera son oeuvre »).
Ces modestes lignes visent à remercier Pipo Delbono et le public du Théâtre des Salins d’avoir fait de “ces gens de plastique” des ballons coloriés qui voyagent dans mon inconscient pour finir par se poser sur un banc de sable mouvant.

Pascal Bély – Le Tadorne

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LES EXPOSITIONS

Eric Boudet photographie la danse de l’humanité.

Eric Boudet chorégraphie la photo de danse. Au fil de ses prises de vues, cette affirmation ne se dément pas : l'exposition « Danseurs noirs contemporains » impulse un regard circulaire entre le sens et nos sens. Loin de se centrer sur une partie, il nous aide à percevoir le tout au gré de nos résonances, de notre mémoire de spectateur, de notre sentiment d'appartenance à « la terre patrie ». Plutôt que de cliver les couleurs, Éric Boudet les différencie pour mieux les relier. C'est un photographe de l'alliage. Avec lui, le blanc et le noir n'ont plus la même fonction : l'un recentre dans le cadre tel un aimant tandis que l'autre donne la force de l'envol.
Cette proposition audacieuse autorise les alchimies entre modernité et tradition, individuel et collectif, liberté et oppression, verticalité et horizontalité, corps noir et regard blanc. Éric Boudet capte tout autant le propos du chorégraphe, que le regard du spectateur : il nous les restitue comme un patrimoine de l'humanité.

A voir à Caen, du 6 au 9 décembre 2006 au Centre national chorégraphique dans le cadre du festival “Danse d’ailleurs” dédié cette année à la danse contemporaine africaine.
A voir à Paris, dans le cadre du Festival « Faits d'Hiver »
au Théâtre Artistic Athévains du 10 janvier au 8 février.

Le site d’Eric Boudet, à voir absolument!
L’article du Tadorne en mars 2006.

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EN COURS DE REFORMATAGE

Swan Lake à Mogador : les cygnes font plouf.

Aller voir Swan Lake chorégraphié par Matthew Bourne ? Avec un cygne dansé par une dizaine d’hommes ? La proposition était engageante.
Révéler son homosexualité à un jeune homme puissant et respecté par l’entremise d’un séduisant oiseau : l’interprétation du ballet classique était audacieuse.
Alors pourquoi tout gâcher en y intercalant des tableaux mimés convenus, où l’imagerie de l’Amérique des années cinquante est comme plaquée sur la musique de Tchaïkovski ?
Sans doute, pour en négatif, mettre en valeur le trouble et la beauté de ces moments où le ballet d’hommes-oiseaux vient tenter le jeune homme.
Sauf qu’on finit par attendre la venue des cygnes pour être transporté et par considérer que le reste du spectacle n’est que remplissage. Dommage que Matthew Bourne ne soit pas allé au bout de ses audaces.

Elsa Gomis.
Paris

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EN COURS DE REFORMATAGE

Avec Galotta, le Tadorne survole le Pavillon Noir.

Je l’attendais depuis si longtemps. Me voilà enfin au pied du Pavillon Noir, le Centre Chorégraphique National des Ballets Preljocaj d’Aix en Provence qui a ouvert ses portes en octobre. Je rêvais d’un lieu dédié à la danse depuis le jour où, en 1998, je découvrais mon premier spectacle au Festival d’Avignon. C’était avec Angelin Preljocaj et je commençais  une belle aventure qui me conduit ce soir à entrer dans ce bâtiment pour la dernière création de Jean-Claude Galotta, « Des gens qui dansent ». J’ai encore vingt minutes pour faire le tour de l’édifice et en ressentir toute la complexité voulue par l’architecte Rudy Ricciotti. J’ai envie d’être aixois, car depuis 1997 j’ai l’impression de ne pas habiter cette ville. Je scrute ce bâtiment et pourtant, je suis ailleurs. Je prépare actuellement une conférence pour mon travail et je n’arrive pas à me sentir dans un théâtre.
J’entre. Le noir m’accueille et m’enveloppe. Je suis surpris de la petite taille de la scène, décalée par rapport à l’idée que je m’en faisais. Le spectacle commence. Deux rangées de chaises se font face. Ils sont onze, dont le chorégraphe lui-même. Ils sont de plusieurs générations, venues de différents pays. Des professionnels côtoient des amateurs. Ils ont tous une histoire singulière. Démarre alors un travail de tissage, de liens, par le corps, le texte et le chant. Je pense à Pina Bauch avec son chef d’œuvre « Kontakthof » vu en avril dernier; je repense au fabuleux « Trois Générations » de Gallotta présenté en 2004. Je revois la si mauvaise pièce « After / Before » de Pascal Rambert. Mes références acquises depuis huit ans se bousculent. Je n’arrive pas à entrer ; des images se télescopent. Je compare. Je hiérarchise. Je m’enferme. Ils dansent et moi je réfléchis à toute autre chose. Je ne vois rien comme si j’étais à côté alors que je suis installé au centre ! Je suis dans une telle position d’observateur qu’il m’est impossible de laisser venir mes sensations. "Tout cela, c’est du déjà vu", me dis-je.
Malgré tout, Jean-Claude Gallotta arrive à m’énerver avec ses gestes, sa voix posée sur une excellente musique rock, son bonnet sur la tête, comme si je ne supportais pas son intrusion dans l’espace des danseurs. Il y a deux moments qui vont m’aider à lâcher : une vidéo où l’on voit Henry Miller sur son lit de mort en train de nous parler de la vie puis une danse à quatre où un homme et trois femmes tissent de tels liens que la forme de leur quatuor touche le sublime. Mais je ne tiens pas sur la durée. Je m’enferme à nouveau et l’ovation du public me laisse cloué, presque tétanisé par les cris de fans venus du fond de la salle. Mon voisin de droite qui n’a cessé de regarder sa montre par ennui se lève pour manifester sa joie.

Je quitte le théâtre, dépité. Je n’ai pas trouvé ma place de spectateur – blogueur dans ce lieu institutionnalisé (le centre chorégraphique national d’Aix en Provence recevait ce soir celui de Grenoble). J’ai touché mes limites et « Des gens qui dansent » n’ont rien pu faire.

Avec le Pavillon Noir, on nous promet « un lieu pour la danse ». Il serait peut-être temps que j’y entre.


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CONCERTS

Avec Jean-Louis Murat, la musique est un échappatoire à la douleur.

Assis dans la salle bien peu accueillante de l’Espace Julien de Marseille, nous voyons arriver sur scène un homme fermé, dont on ne voit pas les yeux, replié sur lui-même. Il prend sa guitare, que son corps entoure, et qui lui donnera sens, énergie. Dès les premières notes, nous le reconnaissons ; mais nous ne le rencontrons pas encore. Nous commençons à entrer dans son univers musical. Puis sa voix, sensuelle, chaleureuse, en totale dissonance avec son physique. Je tente de prendre mes marques, sous le choc encore de ce mal-être. Je ne sens pas le public, très statique, qui ne se permet rien, respectueux de sa réclusion. Murat n’est pas avec nous, il ne donne pas de vie à la salle, il ne semble rien attendre de nous, je me demande ce que cela signifie de venir le voir en concert. Pourtant, il nous donne beaucoup de poésie, emplie de douleur. Ses textes sont forts, ils nous parlent de son rapport à la nature, de ses rapports avec ceux qu’il aime : ses sensations, ses émotions liées à son environnement sont constamment mises en parallèle avec ses relations avec les autres, il aime, il souffre d’aimer, la nature l’apaise ou traduit ses émotions.
Murat ne retrouvera de l’énergie et fera lien avec nous qu’après quelques chansons : son monde est posé, il peut regarder au-delà. Il le partagera.
Sa fragilité est sa force musicale. Petit à petit sa voix se dégage, son visage s’ouvre, la musique le porte, mais nous recevons sa douleur dont nous ne savons que faire, si ce n’est en le saluant chaleureusement.
                                                                                                                         
Clotilde.

Tadornette de Marseille.

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CONCERTS

Dominique A. Chanteur transe – musical.

 

[youtube http://www.youtube.com/watch?v=WJYg04-goLs]

 

Le Théâtre des Salins de Martigues donne rendez-vous ce soir au public du chanteur Dominique A. Il vient rarement en Provence et nous sommes nombreux à l'attendre. Pour ma part, il a changé radicalement ma façon d'écouter et de ressentir le rock. J'ai tous ses albums comme autant de livres que je rangerais dans une bibliothèque pour les transmettre aux générations futures. Dominique A est un artiste essentiel : il symbolise bien plus qu'un style ; il est le courant du « rock littéraire ».
Sur la scène, ils sont quatre : clavier, guitare, deux aux cuivres dont un qui est également percussionniste ! Derrière eux, une rangée de petits néons ; aux quatre coins de la scène et entre les musiciens, des longues antennes comme autant de mats d'un bateau. Ils sont des repères pour délimiter l'espace musical de ce chanteur au territoire si mouvant. Tout au long du concert, ils donnent à la lumière des projecteurs les formes d'un décor surréaliste, entre terre et mer, conscience et inconscience, rock et littérature. C'est donc un concert lumineux, dans tous les sens du terme, qui nous est proposé ce soir. J'ai la douce impression d'être immergé dans une ambiance maritime, où la brume s'évapore à mesure que la musique électrise l'air. Cet équipage traverse l'?uvre de Dominique A : le bateau tangue souvent pris dans un chaos qui laisse peu de place à la respiration. Les murs du théâtre tremblent comme si cette musique voulait pousser les frontières, les cloisons. Je sens une énergie communicative, mais aussi un choix radical : en choisissant ce collectif, Dominique A met en tension son ?uvre pour presque la transformer. Son corps danse comme pour mieux traduire la transe que produit une telle démarche. À mesure que le concert avance, je ressens Dominique A prendre de la hauteur, de la force, comme s'il dirigeait un orchestre symphonique. Je ne tiens plus, coincé dans ce fauteuil de velours rouge. Je rêve de me lever, d'être pour ce groupe un signal venu de la terre.
Cet artiste touche le sublime. Forcément.

Pascal Bély -Le Tadorne

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EN COURS DE REFORMATAGE

Une recommandationTadornesque: la Compagnie des Transe-mutants

Cher Tadorne,

Je t’écris pour te recommander laCompagnie des Transe-mutants que j’ai récemment vu danser au Théâtre de Saint Malo.
En collaboration avec l’association de musiciens « Un bruit qui court », la Compagnie a interprété « Le Sacre du Printemps », un difficile ballet du répertoire classique (ou déjà contemporain ?).
Lors d’une répétition publique au Centre National de la Danse de Pantin, Tristan Edelman, le chorégraphe, avait expliqué qu’il s’était attaché à faire abstraction des nombreuses mises en scènes précédentes.
Il en résulte un travail original, calqué avec précision sur la partition de Stravinsky.

Tadorne, je te conseille cette Compagnie car je sais que tu aimes découvrir de nouvelles formes artistiques.
En étant à la fois accessible par la drôlerie de certaines situations –le techno-man hystérique qui fit rire les enfants-, et provocante -l’orgie géante de tous les danseurs-, la danse transe-mutante est différente.
Avec une énergie brutale, proche des arts martiaux et des danses tribales, les transe-mutants explorent une forme chorégraphique peu présente en danse contemporaine.
Pour autant, le travail sur le ressenti, la pantomime qui traverse les danseurs, ne se retrouvent pas non plus en danse modern jazz.
Aller voir les Transe-mutants c’est donc accepter de changer le regard que l’on porte habituellement sur la danse.
C’est aussi prendre plaisir à voir danser Johanna Classe, dont la présence est telle que l’on s’étonne parfois de ne regarder qu’elle.


Elsa Gomis – Paris.

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EN COURS DE REFORMATAGE

Le Tadorne en novembre.

C’est le mois des valeurs sûres. Tout commence par deux grands artistes qui, comme par hasard, se produisent le 8 pour Jean-Louis Murat à l’Espace Julien de Marseille et le 9 pour Dominique A au Théâtre des Salins de Martigues. Reliés par le calendrier, ils le sont aussi par leur rôle déterminant dans la chanson française.

Le chorégraphe Jean-Claude Galotta ouvrira la saison du Tadorne au Pavillon Noir d’Aix en Provence le 11 novembre avec "Des gens qui dansent" tandis que le metteur en scène italien Pipo Delbono troublera une fois de plus le public si "sage" du Théâtre des Salins de Martigues!
Deux ouvertures prometteuses: une vers le théâtre venu de Riga, "Long Life" le 18 novembre à Martigues, l’autre vers le métissage chorégraphique d’Héla Fatoumi et d‘Eric Lamoureux pour "Wasla – Entrelacs" en Arles le 24 novembre.

Mention photos Dominique A :E. Bacquet