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« Pororoca », patatra et puis basta !

Pendant tout le spectacle, je n’ai pas réussi à m’asseoir convenablement. À plusieurs reprises, je me suis même mis de biais pour voir autrement. Vers la fin, j’ai fini par me lever croyant prendre de la hauteur pour ressentir cette humanité en mouvement.
Curieux, mais jamais touché.

L’oeuvre chorégraphique de la Brésilienne Lia Rodrigues ne m’a pas atteint. Tout juste réussit-elle à interpeller sur la manière dont cette «bombe humaine» se déplace, sans exploser.
Pétard mouillé.

Au Théâtre de la Ville à Paris, la pièce avait fait grand bruit chez les spectateurs. Ici, à Cavaillon, rien. La salle paraît dans l’expectative. Certains se retiennent probablement de siffler, mais la direction du Festival et de la Scène Nationale de Cavaillon avait pris soin de célébrer le talent de la chorégraphe lors de leur numéro de duettiste sans micro.

Sans sonorisation, un groupe de dix danseurs s’agite pendant une heure, s’accordant quelques pauses pour avaler un quartier d’orange comme des sportifs à la mi-temps. Reconnaissons qu’ils s’engagent physiquement à dessiner la vie sociale d’une favela où les murs seraient leurs corps ; les rues leurs liens ; la misère, leur richesse intérieure ; la libido, leur bestialité…La liste pourrait s’allonger à l’infini. Mais sans distance, nous pourrions très bien imaginer une orgie tant l’acte sexuel est suggéré à chaque mouvement. Malgré tout, leur cul, leurs seins, son sexe, me laissent de marbre.


Arrive le moment où ils osent nous regarder, peuple d’Europe, riche et rassasié. Ils finissent par en rire tandis que des spectateurs, gênés, applaudissent. À cet instant précis, je pressens la suite : le groupe remonte l’escalier au milieu du public, à contre-courant. Chez certains metteurs en scène, ce procédé vise à amplifier la dramaturgie au coeur d’une «assemblée populaire». Mais ici, je ne saisis pas le sens de cette traversée en solitaire.

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Pourtant, deux tableaux se révèlent majestueux. Celui, où, par un jeu très subtil de lumières, les corps inertes se relient dans une fosse commune. Les bras n’ont plus que la peau sur les os. Il y a cet autre instant où, pieds et mains à terre, ils dessinent avec leur ventre la «terre patrie » si chère à Edgar Morin.
Mais à l’agitation sur la scène, rien ne répond. Un mur invisible s’est peu à peu dressé avec la salle. Cette danse véhicule une esthétique de la misère, mais ne «précarise» pas le spectateur. “Pororoca” est une démonstration. On montre un pouvoir créatif comme on gonflerait ses muscles. Pour impressionner. Mais leur union ne fait même pas leur force ; leur férocité n’est qu’un jeu de rôles, la favela, qu’un «concept» de plus dans un paysage chorégraphique français saturé d’oeuvres distantes.
Un court instant, j’ai pensé à la place Tahir ; cela m’a rassuré. Des corps en mouvement peuvent m’éloigner de mes rivages.
Permettez que je prenne le large pendant quelque temps.
Pascal Bély – Le Tadorne.
« Pororoca » de Lia Rodrigues – Scène Nationale de Cavaillon – Le 28 février 2011 dans le cadre du festival des Hivernales.

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HIVERNALES D'AVIGNON LE GROUPE EN DANSE OEUVRES MAJEURES Vidéos

Ne me jette pas.

Il arrive parfois que la danse contemporaine nous tende un miroir à mille facettes. Où en sommes-nous? N’avez-vous rien remarqué autour de vous? Mais où suis-je?
Le chorégraphe tunisien Radhouane El Meddeb a une sensibilité bien particulière pour restituer sur un plateau «ce que nous sommes», titre de sa dernière création.
Ils sont cinq dont une qui n’a pas tout à fait l’allure d’une danseuse (magnifique Alice Daquet, alias Sir Alice): de sa robe moulante transparaît de jolies formes (incarnerait-elle Radhouane?). Elle est le «corps social» et porte les stigmates de l’abandon. Elle a cette colère froide, de ceux qui n’ont aujourd’hui plus grand-chose à perdre. Elle observe souvent, se mêle au groupe sans y être. Elle est le «politique» au sein d’un collectif qui ne sait plus comment s’y prendre pour lutter contre la solitude des individus.

Par un subtil jeu de lumières, ils se dévoilent peu à peu. Deux hommes (troublants Olivier Balzarini et Christian Ben Aïm) et une jeune femme  (puissante Anne Foucher), élégamment habillés s’entremêlent tandis qu’une autre, à l’allure fougueuse (étrange Margot Dorléans), (se) cherche. La scénographie d’Anne Tolleter (collaboratrice de Mathilde Monnier) fait encore des miracles: à l’image de la bordure d’un tableau, elle a posé des gravillons noirs et argentés tout autour de la scène. À tour de rôle, ils marchent sur cette étroite bande dont le bruit produit le frisson à l’arrivée de celui que l’on attendait plus, à moins que ce ne soit le son de la relation…À ce tableau, il faut ajouter la musique de Sir Alice: tout aussi profonde que la danse de  Radhouane El Meddeb, elle nous enveloppe et nous donne l’énergie de ne pas lâcher un seul mouvement. Voudrait-elle nous inclure? Et si nous étions le sixième acteur de ce huit clos ?

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Peu à peu, du repli sur soi, enfermé dans leur bulle virtuelle (qui finit par rendre fou), chacun marche en préférant la diagonale pour tisser la toile. Une tête se pose sur le corps de l’autre tandis que des gestes de rien du tout créent la relation de confiance. On se porte, on se supporte. Il y a peu d’envolées, mais que l’on ne s’y trompe pas: les craintes et les désirs s’entrechoquent en silence. Que ces fils paraissent fragiles!  Ces gestes lents créent la partition d’une étonnante chorégraphie poétique où la personne incarne le «tous». C’est puissant parce que nous sommes toujours à ces deux niveaux en même temps: l’individu et le groupe.
Lentement, les corps se répondent, le collectif prend du relief. Tout un paysage relationnel se dévoile: aux sons des gravillons, se superposent le bruit des baisers et des bisous. La créativité de chacun s’exprime dans un cadre sécurisant, l’érotisme s’approche et le désir amoureux fourbit ses armes. Comment  façonner l’autre à notre image? Est-ce l’autre que nous chérissons? N’est-ce pas plutôt la relation (névrotique si possible) que nous cherchons?
C’est à ce moment précis que le groupe bascule dans une violence inouïe. Alors que nos connaissances sur la psychologie n’ont plus rien à avoir avec ce que savaient nos parents, nous semblons les utiliser pour «jeter» l’autre comme une marchandise. Le corps intime et le corps social se fondent peu à peu dans le consumérisme le plus abject où leur marchandisation côtoie le principe de précaution qui voit dans «l’autre» une possible menace. Radhouane El Meddeb dévoile ici son impuissance à se représenter une issue à cette violence née de nos solitudes contemporaines et de notre incapacité à repenser le collectif en dehors des dogmes qui l’ont jadis structuré. Car aujourd’hui, c’est bien  le corps jeté (les suicidés de France Telecom, le corps immolé en Tunisie et ailleurs) qui ouvre la voie à «notre» reconstruction.
Le corps est une bombe. Radhouane El Meddeb est un démineur en Fa Majeur.
Pascal Bély – Le Tadorne.
« Ce que nous sommes » par Radhouane El Meddeb le 25 février 2011 dans le cadre du festival « Les Hivernales».
Crédit photo: Agathe Poupeney.
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FESTIVAL D'AVIGNON HIVERNALES D'AVIGNON

Aux Hivernales d’Avignon, panique à tous les étages.

Il est le musicien, elle est la chanteuse. Ils sont M. Loyal, le gardien de cet immeuble. Ils sont italiens, ça se voit. Comme une marque de fabrique: lui, le bel italien, elle, la mode incarnée. La lumière s’étiole, la musique commence et la voix envoûtante de la chanteuse me berce et permet l’accès aux autres. Ils sont le pont qui nous relie au plateau. Ils sont les passeurs. Un balai de portes débute. Elles tombent, se relèvent, s’ouvrent. Juste le temps d’apercevoir les hommes et femmes qui vivent de l’autre côté.
Ils sont cinq. Cinq, comme les doigts de la main. Unis, désunis, incarnant le vivre ensemble. L’espace scénique nous invite dans leur lieu d’habitation, dans leurs chassés-croisés. Tous sont célibataires (le mal du siècle), cherchant des moyens de communication, d’échanges. Le mouvement lie, délie les rencontres, les corps, nos corps, et souligne l’importance de l’humain qu’Internet a si facilement occulté.
Leur danse fluide a un aura tout particulier: elle est d’une sincérité déconcertante. J’imagine les accompagnant, sonnant à leur porte, dans leur danse empreinte de multiples références (Pina est toujours avec nous).
Leurs histoires s’inspirent du quotidien et l’influence de la Cinecittà est reconnaissable. Visconti, Rosseline, Fellini soufflent sur leurs échanges. Les images de Vespa, de la Mama, de la vie d’immeubles dépeintes dans les vieux films italiens, de l’animation des ruelles, prennent vie sur le plateau. On se sent comme chez soi est c’est ici que la légèreté apparente de la proposition laisse entrevoir l’acte politique et sociétal de la danse. La fragilité des relations humaines mise à nu par le jeu des portes, la beauté des corps se découvrant et la fête pour mieux enivrer les pantins du monde, sont les ingrédients de cette réussite chorégraphique, et invitent le public à l’empathie. C’est une décharge contre le politique, car transposer les personnages dans un immeuble fantasmé, c’est évoquer la dureté de la vie, les privations auxquelles nous, citoyens européens, sommes prêts à affronter (l’image de la rose entre les dents est remplacée par celle du céleri, contexte économique oblige!). Leur monde est le nôtre et toute ressemblance est fortuite.
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J’ai aimé me perdre dans les étages de cet immeuble avec cette bande d’amis, trouvant refuge dans notre cercle, à fredonner des chansons pour endormir les banbini et nous faire supporter le réel.
Je ressors heureux, bercé par la légèreté ambiante qui se dégage de cette proposition, comme si je venais d’écouter un discours politique où tout irait bien.
Laurent Bourbousson – www.festivalier.net

Canzoni del secondo piano, de la compagnie Tecnologia filosofica, au Théâtre des Hivernales, à 10h00, juqu’au 23 juillet.

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L’orgie de secours.

L’hiver n’en finit plus et nos corps se calfeutrent à l’image d’un pays apeuré qui maltraite tout ce qui n’est plus dans la norme. Le « bien » prend le pouvoir pour effacer le « mal » qui se propage. Nous « polissons » pour mieux masquer l’effroyable : les dérives fascisantes et sécuritaires du discours politique et managérial, la violence esthétique de nos entrées de ville, les principes de précaution qui moralisent la prévention. Notre société est incroyablement violente, mais nous cachons, voilons, dénions. Ce soir, à la Scène Nationale de Cavaillon, un chorégraphe, Christophe Haleb, veut nous parler d’amour, sans gants, au coeur d’un festival de danse, « Les hivernales », qui n’en finit plus lui aussi de nous refroidir. Ce soir, cinq interprètes provoquent la stupéfaction, sidèrent, au coeur d’une France qui réussit le tour de force d’anesthésier notre regard sur le corps et ses sécrétions jusqu’à marchander le sentiment amoureux.

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Ils sont cinq qui ne font pas deux couples, mais plus si « affinités ». L’équilibre est déjà quelque peu instable, mais c’est le risque si l’on veut se parler, danser, jouer les corps et l’amour. Tout commence par la manipulation d’une grande bâche, type couverture de survie, qu’ils étirent en long, en large et surtout de travers. Car la chose n’est pas facile à manipuler, quoiqu’on en dise. Ils voudraient bien la contraindre, mais la matière les fait glisser et tomber. Ils sont les abandonnés d’une certaine forme « industrialisée » de l’amour. Leur radeau est notre naufrage. La scène ne penche pas, mais c’est tout comme : comment ne pas confondre se protéger du sida et se prémunir du corps de l’autre ? Ils  prennent à bras le corps cette bâche pour retrouver, tels des bonobos au temps de la préhistoire, les chemins du jardin des plaisirs, le sens du délice d’un jet qui vous gicle sur la peau. Il y a urgence et c’est beau.

Ils se moquent de tout sauf de la chair et du plaisir charnel. Aucune vulgarité, mais une détermination : il faut que ça gicle pour nous débarrasser de tout ce qui pollue notre rapport au corps amoureux, là où le discours a pris le pas sur le « liquide ». Il est loin le temps préhistorique où l’espèce humaine « forniquait » comme bon lui semblait, sans protection, sous hallucination dû aux plantes mâchées au grès des cueillettes ! Même les derniers jardins des plaisirs sont aujourd’hui rasés par des municipalités plus promptes à se protéger de l’amour, mais acceptent sans broncher l’indécence d’un panneau publicitaire qui marchande le corps des femmes. Nos cinq acolytes enchaînent alors simulacres d’émissions radio, de reportages et séances de spiritisme. La propagande ainsi détournée provoque la crise de rire sur un sujet épineux : à mesure que nous enveloppons le  corps (les pandémies ne font qu’accélérer le processus), nous maltraitons le lien amoureux.

Mais Christophe Haleb est victime de la manipulation qu’il dénonce. Son plateau de télévision et son studio de radio placés à gauche de la scène, attirent le spectateur bien que deux danseurs s’essayent sur la droite, à quelques figures chorégraphiques. Christophe Haleb se perd dans la dénonciation là où nous aurions eu besoin d’un lien généreux. Or, sa danse fabrique du « discours » pour illustrer les idéologies spirituelles et religieuses alors qu’elle aurait du les transcender. L’ensemble met finalement le public à distance alors que nous aurions pu nous jeter (symboliquement) sur scène comme à Uzès Danse en 2009 où Christophe Haleb nous avait présenté une étape de création. Huit mois après, le discours s’est radicalisé, le groupe s’est protégé du public avec une installation qui a pris le pas sur la danse.

« Un peu de tendresse, bordel de merde !» (1).

Pascal Bély – Laurent Bourbousson – www.festivalier.net

(1) Titre de la pièce tout aussi « liquide » du chorégraphe canadien Dave St Pierre présentée au Festival d’Avignon 2009 qui dénonçait lui aussi la liquidation progressive du lien amoureux au profit d’un discours marchand.

“Liquide” par la compagnie “La Zouze“, chorégraphie de Christophe Haleb, a été joué le 18 février 2010 à la Scène Nationale de Cavaillon dans le cadre du festival des Hivernales d’Avignon.

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La Belgique, terre d’accueil de Lespri Kò.

Le théâtre des Doms, « la vitrine sud de la création en Belgique francophone », reçoit deux spectacles de la programmation des Hivernales d’Avignon. Avec chaleur, le responsable du lieu nous accueille, jusqu’à nous offrir thé et café chaud à l’entracte. Ici, en terre belge, l’accueil est gratuit, sans bande sonore de supermarché. Il se trouve que les deuxpropositions sont accueillantes et réchauffe l’ambiance glaciale qui plombe le festival. Tout est donc lié.

Ce soir, Patricia Guannel impressionne, sidère, hypnotise.  « Lespri Kò » de Patrick Servius restera l’un des moments forts du festival. Pendant quarante minutes, elle nous inclut dans le processus si complexe de l’identité, là où tant d’autres (ailleurs) la réduisent à quelques critères d’un autre temps.
Elle est de dos. Elle se coiffe et nous arrivons presque à l’improviste, comme enfant quand nous surprenions notre mère  en train de faire sa « toilette ». Elle replie ses cheveux aériens telle une introspection. Elle est black, belle, généreuse. En fond de scène, nous imaginons une statue recouverte d’un drap gris, tel un fantôme à l’affût. Là voilà qui s’élance, avec sa jolie robe colorée dans un environnement si noir…
À partir de ses mouvements saccadés, elle explore sa danse, ses liens. Elle et nous. Black, blanc. Antilles, métropole. À ce moment précis, nous sommes séparés, à bonne distance et cela me va bien. Autonome, elle s’en va chercher son identité dans la langue de ses ancêtres, ceux-là mêmes que nous opprimions. Elle essaie, s’arrête, reprend. Ce travail demande du temps qu’elle s’octroie, avec détermination et confiance envers le public. Tout semble lui échapper comme si rien ne s’offrait avec facilité. Elle va, vient, recommence, nous sourit pour s’inquiéter plus tard de notre passivité. Peu à peu, sa quête devient la nôtre et finit par nous embarquer. Avec Patricia Guannel, l’identité est une recherche du mouvement, là où l’on voudrait la statufier dans la généalogie. Son jeu impressionne : c’est une actrice qui danse. Rare. Avec elle, l’identité est au croisement du corps et de la parole. Avec elle, s’identifier s’est réapprendre à parler la langue du corps. Magnifique.
Elle finit donc par enlever sa robe pour l’enfiler sur un buste. La voilà européenne, maillot et soutien-gorge. Noir sur noir. Les couleurs sont à distance. Elle tourne autour, s’élance et se perd. Nous perd. La chorégraphie se cherche à l’image d’un pays qui peine à tisser les identités. Dans les dix dernières minutes, la danse l’aliène et nous aliène. Plus souvent à terre, son espace semble subitement réduit. Et l’on voudrait enfermer ce buste normalisant pour redonner à la France ses couleurs. Patrick Servius doit poursuivre sa recherche. Et nous avec.

Après un entracte chaleureux, c’est donc Zachée Ntambwé, alias Cheza, qui range ce buste ! Il nous vient de Belgique. C’est un grand gaillard à la timidité impressionnante. C’est bien plus qu’un danseur hip-hop. Avec « back to the Roots », il est un interprète magnifique qui danse son identité multiple. Avec joie. Car c’est homme est heureux de sa danse au coeur de rythmes blues, afro-krump, house et de musiques traditionnelles congolaises. Né en Belgique, originaire du Congo, il passe par la danse pour travailler ses racines. Il y inclut du texte qu’il tisse à partir de mouvements identitaires qui n’opposent pas l’Europe et l’Afrique, mais  les relient en croisant des histoires singulières pour créer l’histoire commune. Cheza nous invite à assumer notre passé colonial comme une ressource pour nous rencontrer. Sa danse opère la rencontre.
Croyez-le, ce moment est unique, car il vous donne l’énergie de repousser la peur de la différence et d’accueillir la diversité. A croire que la Belgique est le coeur du monde.

Pascal Bély- www.festivalier.net

« Lespri Ko » de Patrick Servius et « Back to the Roots » de Cheza ont été joués les 16 et 17 février 2010 au Théâtre des Doms dans le cadre du festival « Les Hivernales » en Avignon.

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La danse enterrée.

Ambiance glaciale pour l’ouverture du festival de danse contemporaine en Avignon, « les hivernales ». Le public n’est pas au rendez-vous pour « Switch me off », fruit d’une rencontre entre un metteur en scène (Thomas Ferrand) et un chorégraphe, directeur du Centre Chorégraphique National de Tours (Bernardo Montet). Pourtant, nous aurions du être nombreux pour accueillir la danse, art de l’ouverture, tant on imagine difficilement l’inverse : un chorégraphe dirigeant des comédiens. On serait en droit d’attendre que ce spectacle hybride nous conduise dans un ailleurs, un espace inédit. Déception. Je n’ai pas décollé du sol.

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Dans une récente interview à « La Nouvelle République », Bernardo Montet dit avoir bâti « une pièce qui a autant à voir avec la photographie, les arts plastiques que la danse. Une sorte de poème composé pour la scène?Une oeuvre où le vide est riche de sens, où l’invisible devient visible, où l’imaginaire de chacun est laissé libre, et où l’histoire collective devient soudain individuelle. ». Soit. Sauf que cet ensemble hétéroclite ne crée pas le paysage.

Bernardo Montet est un homme à la carrure impressionnante. Alors qu’il s’avance nu, les pieds dans la terre, son « ciel » est un magnifique assemblage d’ampoules dont le tout façonne un imaginaire baroque. Ses premières apparitions sont de toute beauté, car on ne sait d’où il arrive. Rapidement, cet homme « lourd » évoque notre humanité. Ses mouvements, ses cris, témoignent. C’est un retour aux sources de la vie. Dépouillé à l’image de sa danse, son corps transporte toutes nos fractures. Évoluant dans l’antre de la terre, là où les âmes se perdent, il s’ébat, crie « I’m here », comme pour mieux s’affranchir de sa vie.

Mon imaginaire est prêt à se laisser tenter par l’aventure, mais la mise en scène est une entrave. L’ambiance apocalyptique plombe l’évolution de la danse. Dans ses précédentes créations, le parti pris de Thomas Ferrand est d’en faire toujours trop avec les mêmes bruits d’un même chaos ambulant. Pourquoi donc l’affubler d’une perche où vient se nicher un micro (emblème phallique ?) afin que l’homme crée du son avec les ampoules ? Cet objet utilitaire, laid, rempli sa fonction, mais clive l’espace : ici le son, là le corps, ailleurs le mouvement. Pourquoi donc réduire la sphère entre la terre et le cosmos pour que l’homme trace son sillon de gauche à droite pour « travailler » sa danse à défaut de l’incarner ? Pourquoi donc ces « tics » de mise en scène (avec la musique stridente tant entendue ailleurs) qui illustrent (pour venir vers nous fort et déterminé, l’homme « retouche » son sexe dans la terre !), hypothéquant définitivement la force du mouvement dansé? Là où le décor fait oeuvre d’art, où le corps fait le danseur, Thomas Ferrand impose une installation et précarise la danse.
Le tout est une jolie démonstration qui force le respect. Et c’est bien là notre problème.

Pascal Bély-Laurent Bourbousson- www.festivalier.net

« Switch me off“, mise en scène de Thomas Ferrand a été joué le 13 février 2010 dans le cadre des Hivernales d’Avignon.

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HIVERNALES D'AVIGNON

Vue d’Avignon, hivernale Afrique.

Ainsi donc, l’Afrique fait de nouveau parler d’elle. Alors qu’un média français l’insulte avec une émission de télé réalité, un festival de danse contemporaine la met à l’honneur (« Les Hivernales d’Avignon »). Tandis que le site « Arrêts sur Images » faisait dernièrement le point sur le terrible problème d’image dont souffre ce continent, condamné à la fatalité des stéréotypes, l’éditorial (1) du directeur des Hivernales crée le malaise. Là où TF1 ridiculise les Africains à coup d’animaux dangereux et de danses tribales, Emmanuel Serafini l’enferme dans un discours consensuel: «… j’ai constaté que chaque fois que j’étais sensiblement touché, le chorégraphe et/ou interprète étaient d’origine africaine ». Je vous laisse le soin de poursuivre la lecture de cet « éditorial » où les clichés abondent. Comment ne pas faire le rapprochement entre  leur « danse originale » « en pleine maîtrise de leur art » vantée par Emmanuel Serafini et l’agilité que l’on prête aux Africains sur un terrain de sport ! La rhétorique est exactement la même. Mais le plus extraordinaire est l’association pour le moins saugrenue faite entre l’Afrique décrite dans ce texte et certaines oeuvres programmées par les Hivernales. Ainsi, «Loin… » de Rachid Ouramdane (pièce à ne pas manquer) n’a rien à voir avec la danse africaine à moins que l’on ne veuille enfermer Rachid Ouramdane dans ses origines. En quoi le port de l’hidjab dénoncé par Héla Fattoumi et Eric Lamoureux dans « Manta » est-il lié à l’Afrique à moins de souhaiter réduire les musulmans à une couleur de peau ? Quand allons-nous pouvoir approcher ce continent, non à partir de ce que nous fantasmons, mais en fonction d’un projet politique, au sens noble du terme, fait du croisement de nos histoires, de nos valeurs et de nos ressources.

Oublions donc cet éditorial réducteur pour nous concentrer sur la programmation. À ne manquer sous aucun prétexte, la dernière création de Christophe Haleb, « liquide ». Nous avions vu une étape à Uzès Danse en 2009 où nous avions été impressionnés par la force du propos sur la question de l’amour.  C’est à la Scène Nationale de Cavaillon et c’est un chef d’oeuvre.
On ira voir avec intérêt ce qu’est devenu le metteur en scène Thomas Ferrand que j’ai suivi à ses débuts ( !) : associé au chorégraphe Bernardo Montet, « Switch me off » est à coup sûr une curiosité.
Nous avions beaucoup aimé DeLaVallet Bidiefono alors qu’il jouait et dansait en 2009 dans « nos enfants nous font peur quand on les croise dans la rue » de David Bobée. « Empreintes …  on posera les mots après » est sa cinquième création qu’il présente aux Hivernales. On y va.
Hélène Iratchet
est la chouchou des centres départementaux chorégraphiques. Nous avions beaucoup aimé « Jack in the box » en 2008. Cette année, « hommage d’un demi-dimanche à un Nicolas Poussin entier » promet sur « la complexité et la beauté des relations humaines ». J’ai confiance.
Que penser de « Manta » d’Héla Fattoumi et Eric Lamoureux vue lors du dernier Montpellier Danse ? La pièce porte sur le Hijab et permettra aux spectateurs de se faire une idée sur la question dans un contexte d’islamophobie grandissant. Je ne suis pas sûr que cette oeuvre serve Héla Fattoumi qui perd de son « geste artistique » au profit d’un exposé militant descendant et excluant. Mais à chacun de se faire une idée sur une prise de parole politique, après tout plutôt rare dans le milieu de la danse.
Revoilà donc Thierry Baë qui m’avait passablement énervé à deux reprises (une fois en 2006, une autre fois en 2007). Cette année, « tout ceci (n’) est (pas) vrai » va surement jouer avec mes nerfs. J’y reviens, à croire que je dois aimer ça.
Je me calmerais probablement avec la compagnie « Le rêve de la Soie », animée par Patrick Servius. La sensibilité de ce chorégraphe parviendra-t-elle à me toucher ? « Lespri Ko » est en tout cas un joli titre.
Ensuite ? Cela sera une totale découverte puisque la moitié de la programmation m’est totalement inconnue. La mission d’un festival est bien là : nous faire appréhender d’autres territoires chorégraphiques, au-delà des frontières.
Nul besoin d’éditorial pour se laisser tenter. À 32 ans, les Hivernales ont l’âge de jouer dans la cour des grands.

Pascal Bély – www.festivalier.net
« Les hivernales d’Avignon » du 13 au 20 février 2010. Réservation au 04 32 700 107.

(1)D’ici et de là-bas?

Loin de Rachid Ouramdane, Vu de Hafiz Dhaou et Aïcha M’Barek, Poussière de sang de salia nï seydou, Manta de Héla Fattoumi & Eric Lamoureux…  Après avoir vu beaucoup de pièces chorégraphiques, j’ai constaté que chaque fois que j’étais sensiblement touché, le chorégraphe et/ou l’interprète étaient d’origine africaine?
Le coeur de la création chorégraphique se serait-il déplacé vers le continent africain ? La force des oeuvres, l’inventivité de la danse, la présence des interprètes, leur maîtrise du langage de la danse contemporaine occidentale, troublent au point de le penser?
A travers une danse originale, portée par des interprètes virtuoses, en pleine maîtrise de leur art, les artistes africains nous font découvrir leur univers. Ils placent au coeur de leurs oeuvres les préoccupations de leur temps, de leurs pays. Les chorégraphes et danseurs africains persistent à se faire entendre. Ils tracent leur propre chemin en proposant leur perception du monde. Ils participent à la transmission d’un message universel. Maintes fois donné pour mort, ce continent résiste. Loin des traités et des accords internationaux, je vous propose cette année une nouvelle carte du Monde, recomposée avec la danse d’artistes africains nés là-bas travaillant ici, mais aussi à des artistes issus de l’immigration travaillant ici et montrant leur travail là-bas puisque, comme le disait Paul Virilio, … Les nouveaux sédentaires sont ceux qui sont partout chez eux… 

Emmanuel Serafini
Directeur

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FESTIVAL MONTPELLIER DANSE HIVERNALES D'AVIGNON

De Montpellier Danse à Avignon, Rita Cioffi pas à pas.

A Montpellier Danse, le 22 mars 2007

J’ai envie de danse. En déplacement professionnel, il est temps de sortir de cette chambre d’hôtel déshumanisé où la télévision fait office de fenêtre vers l’extérieur. L’air est glacial et j’entre me réchauffer au « Chai du Terral », beau théâtre de l’agglomération de Montpellier. Rita Cioffi présente « Pas de deux », duo dansé sur le couple à partir duquel « les processus d’identification et de différenciation créent l’identité et construisent l’individu ». Ambitieux programme. Inutile d’aller chercher dans la confrontation des deux danseurs une quelconque métaphore du couple amoureux. Je n’y trouve rien. Trop loin de moi, peut-être…Est-ce la rencontre entre l’homme et une femme ? Difficile à cerner tant ils me paraissent asexués. Lui est fort, elle plus frêle. A quoi bon de les voir ainsi ? Cela n’a toujours pas de sens…Alors ? Je m’accroche moi aussi à leurs vêtements : ils ont une fonction essentielle quand ils se relient à partir de la poche de leur jean’s, glissent leurs mains dans les plis d’un tissu rebelle, s’engouffrent dans le t-shirt de l’autre. Le textile est alors cette seconde peau que nous cherchons en l’autre, en soi, avec peur, colère, désir et détermination. Leur danse, parfois mécanique, les transforme en statue, comme si le corps était matière dont nous serions le sculpteur par nos regards furtifs ou appuyés. C’est beau et profond. Nous aurions pu en rester là. Mais voilà qu’une vidéo de Roberto Sacova vient ponctuer ce « pas de deux ». Avec nostalgie et tristesse, le film normalise leurs rapports, joue sur les ralentis et annule le lien que je construisais pas à pas avec ce couple. La vidéo prend alors le pouvoir sur le vivant.
Je quitte le théâtre avec un goût d’inachevé. De retour à l’hôtel, j’avais laissé la télévision allumée. Un homme et une femme s’affrontent. J’éteins.
Pascal Bély- www.festivalier.net


Deux années plus tard, aux Hivernales, pendant le Festival Off d’Avignon. La vidéo a disparue.

Dans le petit studio des Hivernales, Rita Cioffi, chorégraphe, et Claude Bardouil, comédien, nous offrent un « Pas de deux » sublimant le corps.

Ils nous tournent le dos : elle et lui, le féminin et le masculin, deux corps.

C’est dans un calme absolu que leur danse débute. Chacun s’échauffe puis c’est l’approche. Le rapport de force commence puis la dualité du féminin et du masculin se complexifie. C’est physique, psychique, tactile, érotisant, tout en respect. Juste ce qu’il faut sans tomber dans l’excès.

S’attachant à leur vêtement, comme s’ils se prenaient à même la peau, Rita Cioffi et Claude Bardouil arrivent à n’être qu’un seul corps. Ils se fondent littéralement l’un dans l’autre. De l’interprète à la chorégraphe, les rôles s’inversent et s’abandonnent. Le public plonge alors dans cette danse charnelle qui lui offre une belle leçon chorégraphique.

La collaboration entre Rita Cioffi et Claude Bardouil se déploie parce que chacun semble avoir fait un travail sur lui-même. Pour Martha Graham, chorégraphe américaine, « l’art du danseur est bâti sur une attitude d’écoute, qui implique tout son être ».

Impliquant pas de deux.

Laurent Bourbousson – www.festivalier.net

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HIVERNALES D'AVIGNON PAS CONTENT

Aux Hivernales d’Avignon, le Hip Hop s’affranchit du sens.

“L’inéluctable solitude de l’homme, voilà le point de départ de cet étonnant duo“, telle est la présentation de “Seuls, ensemble” de la compagnie Clash 66. A l’issue de cette représentation,  ce sera aussi le point d’arrivée pour bon nombre de spectateurs à l’exception du public jeune, enthousiaste, qui acclame ce duo de hip-hop.

L’histoire est celle de la confrontation à l’autre. Elle prend place ici et là-bas, grâce aux techniques de projections sur écran. Le tout a un côté kitsch assez déconcertant. Le savoir-faire de ces deux danseurs de hip hop (Raphaël Hillebrand et Sébastien Ramirez) est au rendez-vous, il n’y a rien à redire.

Mais, mais…

L’écriture dramaturgique est épaisse comme une brindille. C’est un enchaînement de bravoure hip hopienne et l’on finit par lâcher prise. Les prouesses techniques sont là, mais le hip hop, en se déplaçant de la rue au théâtre, se doit d’être exigeant avec lui-même. Il devrait s’affranchir du geste pour aller au-delà. Le discours retenu (la confrontation à l’autre puis l’entraide) aurait mérité un travail de fond pour dépasser les images toutes faites (celles des ombres qui se donnent la main, par exemple).

En s’adressant à la jeunesse, qui est le futur public de danse, les programmateurs doivent faire preuve de plus de discernement. Avec “Seuls, ensemble”, Clash 66 laisse place à une danse sans fondement et valide l’idée que le hip hop n’a plus rien à dire.

Laurent Bourbousson – www.festivalier.net

“Seuls, ensemble”, au Studio des Hivernales, jusqu’au 26 juillet à 15h30. Relâche le 21 juillet.

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ETRE SPECTATEUR HIVERNALES D'AVIGNON LA VIE DU BLOG OEUVRES MAJEURES

Maguy Marin aux Hivernales: retour vers le futur.

C’était en juin 2006, à Montpellier Danse. Maguy Marin avec “Ha ! Ha !”  provoquait un séisme dont le public et les personnels du festival se souviendront longtemps. Je n’ai cessé de penser à cette chorégraphie pour faire évoluer mon regard porté sur la société du divertissement. Je ne compte plus les moments où j’ai fait référence à « Ha ! Ha ! » lors de mes interventions professionnelles ou personnelles. J’ai eu en retour une écoute intéressée comme si le propos de Maguy Marin faisait résonance chez ceux qui ne se posent plus de questions face aux rires graveleux des émissions télé ou radio. Le festival des Hivernales a programmé « Ha ! Ha ! » au théâtre de Cavaillon le 1er Mars. Je publie à nouveau ma critique de l’époque en espérant susciter le débat de cette pièce qui aurait dû être au coeur du projet et présenté à l’Opéra d’Avignon ou au Théâtre des Hivernales.
En mars 2005, Jerôme Bel avec « The show must go on » provoquait un joli séisme au Théâtre des Salins de Martigues en interrogeant, par la provocation, les raisons pour lesquelles nous venions le voir.
En juillet 2005, le Festival d’Avignon positionnait le public dans un autre rapport à l’art théâtral en proposant des oeuvres métaphoriques et des performances. Le débat « texte ou pas » clivait la presse nationale.
En mai 2006, Le KunstenFestivaldesArts de Bruxelles poursuivait cette dynamique en invitant le spectateur à repenser le rationalisme pour se projeter dans un monde plus complexe où les aléas et les incertitudes seraient source de créativité.
Montpellier Danse ne pouvait donc pas rester à l’écart de ce mouvement de fond. La chorégraphe Maguy Marin, avec « Ha ! Ha ! » a eu le courage d’interroger la fonction du rire dans une société qui fuit la recherche du sens. Comment expliquer le désir croissant du public à vouloir se détendre dès qu’il va au théâtre ? Comment interpréter la part dominante des émissions de divertissement entre 18h et minuit sur les chaînes de télévision ? À quoi font référence les expressions si souvent entendues, prononcées le plus souvent sur un ton moqueur : « Pourquoi te prends-tu la tête ? », « Si en plus il faut penser au travail quand je vais voir un spectacle ! ». Cette recherche du divertissement gagne progressivement le public de la danse. Que se joue-t-il ? Dans le contexte actuel français, le rire, loin d’être créatif et libératoire, cache, masque la complexité des situations. Il s’articule sans aucun problème à la pensée linéaire, au discours politique le plus simpliste. Une société qui veut rire de tout, se distraire à tout prix, prépare le fascisme.
Courageusement, Maguy Marin a décidé  de réagir. Il y a urgence à renvoyer un questionnement au public, de peur de voir en France et en Europe, l’art disparaître. Pour cela, nous avons à nous repositionner : il n’y a plus d’un côté les artistes qui proposeraient une création pour, de l’autre, des spectateurs consommateurs passifs. Même Helena Waldmann a compris la nécessité d’interpeller le public lors de « Letters from Tentland Return to sender » vu une semaine auparavant. Je ne souhaite pas faire part de ce qui s’est passé à l’Opéra Comédie de Montpellier, dimanche soir. Il y aurait un paradoxe à expliquer un processus qui vous empêchera de le vivre. Toutefois, avant de courir voir cette oeuvre, sachez que Maguy Marin inverse les prémices : nous sommes les acteurs, les danseurs sont les spectateurs. De la sorte, elle propose un art conceptuel et c’est à nous de recréer le concept. Ce nouveau positionnement nous aide à redevenir acteur, à sortir de la soumission imposée par la société du divertissement. Elle provoque un électrochoc salutaire en nous accompagnant à retrouver la posture du dedans-dehors qui seule permet de recréer un lien avec l’art, avec les artistes.
Oui, grâce à Maguy Marin, je n’ai plus honte de me prendre la tête. Elle me redonne la force de continuer ce blog, de poursuivre le chemin tracé depuis tout jeune : c’est la recherche du sens qui fait une vie. Maguy Marin a porté ma voix, celle de beaucoup d’autres. Elle m’a libéré des vexations dont je peux parfois faire l’objet (la dernière en date : “à quoi ça sert de voir tous ces spectacles ? N’as-tu pas envie de lâcher ?” ; le tout dit en riant !).
J’ai crié « Bravo » pour masquer les insultes d’une partie du public. À ceux qui ne perçoivent pas la menace sur l’art dans notre pays, rendez-vous dans les villes où Maguy Marin proposera « Ha ! Ha ! ». Revenez sur ce blog. Échangeons. Passionnons-nous. C’est l’une des ripostes au totalitarisme ambiant.
Sous les pavés, l’art et le social?
Pascal Bély – Le Tadorne
"Ha! Ha!" a été joué le 1er mars 2007 au Théâtre de Cavaillon dans le cadre du Festival "Les Hivernales" d'Avignon.

Crédit photo: Christian Ganet.