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Aux Rencontres Photographiques d’’Arles, la France rêvée?

 
 
 
 
 

Dernière partie de mon immersion dans les Rencontres Photographiques d'Arles. Pour être exact, c'est une plongée dans des univers où la photo transcende, ouvre la voie vers une autre réalité.
Allessandra Sanguinetti avec «
Les aventures de Guille et Belinda et l'énigmatique sens de leurs rêves » m'a littéralement happé. Submergé par l'émotion, j'ai retrouvé le milieu ouvrier dans lequel j'ai grandi et les mondes imaginaires que je me construisais. Mais aucun photographe n'était là pour immortaliser mes rêves ! Guille et Belinda sont deux cousines de dix et neuf ans, dont les parents possèdent des terres agricoles près de Buenos Aires. En pénétrant leurs espaces fantasmagoriques, Allessandra Sanguinetti nous offre des photographies de toute beauté : entre la fin de l'enfance et le début de l'adolescence, elle arrive à capter l'insondable (cette part de rêve si secrète). Les corps de transforment et flottent pour se mouvoir dans un environnement solidaire. Elles nous proposent une vision métaphorique de notre monde avec humour et gravité, loin des clichés habituels (« la vérité sort de la bouche des enfants » !). Allessandra Sanguinetti a obtenue le « Prix Découverte » des Rencontres. Largement mérité.

Deuxième choc. Gilles Leimdorfer avec « Que reste-t-il? ? » nous présente une série de photographies prises le long de la mythique Nationale 7. C'est une France dont on ne parle jamais : celle défigurée par les zones commerciales, le béton et les ronds – points (La Côte d'Azur…beurk). Mais aussi, cette France qui a peur, qui a porté Jean-Marie Le Pen au second tour : «?j'ai souvent fait peur. Avec mon Leica autour du cou, on m'a pris pour un flic, un pédophile, un serial killer, rarement pour un photographe ». Malgré tout, Gilles Leimdorfer a su capter une France rurale poétique où les Français cherchent cette part de rêve que les médias vendent à longueur d'émissions. Retenez son nom : c'est un grand photographe qui nous ouvre les yeux sur ce que nous ne voyons plus.

Raphaël Dallaporta et Ondine Millot avec « Esclavage domestique » ont pris le parti artistique de photographier en France des immeubles et des maisons, où ont séjourné des personnes réduites à la fonction d'esclave. À côté de chaque photo, un long texte présente la situation. Cette installation me positionne en dehors alors que cela se passe à côté de chez moi. La photo est prisonnière du texte alors qu'elle aurait pu s'en libérer. La photo ne transcende rien : elle reproduit les processus qu'elle dénonce. Rageant.

Troisième sidération. Vincent Debane avec « Station ». C'est un photomontage réalisé en deux temps : Il photographie des Franciliens en attente de leur train en gare Saint Lazare. Puis, il associe des paysages suburbains. Ce changement de contexte confère alors à la position d'attente, des airs de prière, de sidération, de révélation. C'est une autre vision de la France : celle d'habitants en quête d'une parole venue d'en haut dans un environnement triste, défiguré par le béton et les tours. Je ressens ces photos comme sans issue si nous continuons à regarder dans cette direction. C'est un puissant message à la veille d'une échéance politique majeure.

Mais est-ce cette France dont rêvent les candidats à l'exil ? Olivier Jobard avec « The Hard Way, The only Way » nous propose le carnet de route d'un immigrant clandestin à partir de photos et d'une installation audiovisuelle qui nous permet d'entendre Kingsley commentant son arrivée en France. Je suis sidéré du décalage qu'il y a entre cette France si peu accueillante et l'énergie de ces clandestins pour rejoindre notre pays. C'est presque incompréhensible. Que sommes-nous devenus ?

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