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B. ¹03 Berlin de Roméo Castellucci m’a perdu…

Mardi 12 juillet, Journée noire au Festival d'Avignon.

 
 


J'ai rendez-vous à 19h au Théâtre Municipal pour B. ¹03 Berlin de Roméo Castellucci. Je n'aime pas ce théâtre : il est vieux, mal fait et l'on ne trouve jamais sa place?Quelle métaphore ! Des lapins en tissu occupent les places des spectateurs. Je dois, tout au long de la pièce, composer avec un objet que je n'ai pas choisi. Le lapin sert immédiatement de repose pied et d'exécutoire tout au long de ce spectacle prétentieux.

 


Je ne suis pas au théâtre mais dans un autre univers qui n'est pas le mien. Il n'y a pas de texte (à part le chant d'un coq) et le langage métaphorique (un voile sépare le public de la scène, des peluches gesticulent,?) m'est complètement hermétique.  Pour finir?la lumière devient bleue lorsque l'enfant paraît et que les moutons dorment ! La ficelle est grosse mais revenir en enfance est une tactique payante (Freud en a fait toute une théorie !).  Quelques sifflets fusent à la fin mais les spectateurs semblent ravi d'avoir si bien dormi  (ma voisine ayant applaudit chaleureusement après  un long sommeil bien mérité). Je quitte le théâtre furieux contre?la police municipale qui se trouvait sur mon chemin ! Je m'en veux de ne pas avoir compris, d'être passé  à côté, d'avoir abandonné le lapin en tissu dans un piteux état sous mon fauteuil.

 

Il est 20h30 ; j'ai faim. Je m'arrête dans une brasserie ;  je crains de m'étrangler quand le serveur m'annonce qu'un lapin à la provençale est au menu?

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Olivier Py, le beau vainqueur du Festival d’Avignon!

 

Il est 13h en ce dimanche à l’ambiance d’un printemps humide. J’ai le cœur qui bat comme si j’avais un rendez-vous amoureux. Cela peut paraître étrange mais Olivier Py a su créer avec son public un lien unique. Notre dernière rencontre remonte à 2000 pour « l’Apocalypse Joyeuse »  où de 17h à 5h du matin, j’avais assisté à l’un des plus grands spectacles de ma vie. Je repense encore à cette ambiance si particulière dans le public quand débuta à 4h du matin le dernier acte ! Seul le Festival d’Avignon peut nous procurer de tels moments !

Il est 14h15, j’arrive au Gymnase René Char à Avignon. Le public est là…Je regarde autour de moi pour me familiariser avec ceux qui m’accompagneront pendant 9h30 ! Je suis surpris : il est beaucoup plus jeune qu’ailleurs ; cela me rassure quand on connaît la désaffection de la jeunesse pour le théâtre vivant. Je m’installe entre une jeune fille et une…moins jeune ! Toutes les deux me repèrent (savent-elles que je vais parler d’elles dans mon blog ?!). La discussion débute autour d’Olivier Py et… « dérape» sur l’Europe ! Ne me demandez pas pourquoi, ni comment…Elles ont votées « non », j’ai voté « oui ». Les arguments fusent à nouveau et je lance, presque à haute voix : « Le non amène les nationalistes ! Les mêmes qui invitèrent Le Pen au deuxième tour, assoient le populiste Sarkosy ». Un homme qui se réclame soixante-huitard intervient : « C’est Mitterrand qui a amené le fascisme en France ». Je me sens mal…effondré par ce qui se joue…Je ne vois que des « nonistes ». La rupture dans le clan de la gauche est forte et l’Europe est à plat.

Le spectacle commence…Comment parler de 7h de magie ? Tout se passe en Arcadie, pays imaginaire et pourtant si réel quand Py décrit ses rapports avec …La France. L’auteur s’en donne à cœur joie pour décrire la décadence de la démocratie française, sa corruption et les effets du vote « non »…Je jubile intérieurement à l’idée d’imaginer la tête du soixante huit tard… Le public suit avec attention l’épopée de Florian, « l’homme au sourire » ; ce sourire qui l’empêche d’aimer. Nous suivons le passage de la dictature à la « monarchie démocratique » de l’Arcadie ! Nous frissonnons pour l’amour de Florian pour le jeune Homme muet, à l’histoire passionnelle entre Florian et Ferrare, industriel véreux qui finira chrétien assagit ! L’amour est entre hommes et qu’importe qui est homme, qui est femme…La mise en scène est haletante, les comédiens tous extraordinaires (mention toute spéciale à Christophe Maltot, magnifique comédien en roi, devenu prostitué pour finir fossoyeur unijambiste) et le jeu des décors appuie l’aspect dramatique et festif de la pièce.

Les entractes permettent de nouer des liens avec les spectateurs. J’entame une conversation avec une jeune étudiante qui veut devenir comédienne. Elle me fait part de sa difficulté d’aimer,  à l’image de Florian ! Je suis touché par une telle sincérité. Nous entamons le dernier acte (« La couronne d’olivier ») assis côte à côte. J’aurais bien continué la soirée platonique avec elle mais je n’ai pas osé !

« Les vainqueurs » est une magnifique trilogie même si parfois il m’est arrivé de décrocher quand Py va trop loin dans le concept « métaphysique ». Mais il sait rendre le théâtre vivant. Pour la première fois de ce festival, j’ai crié « Merci » lors des applaudissements.
J’ai besoin du théâtre pour sortir du jeu.

 

A lire le bilan du Tadorne sur le festival d’Avignon 2005.

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Marina Abramovic dans le coeur du Festival d’Avignon.

Lundi 11 juillet 2005. Une journée européenne.

France Inter ; 8h20. Bernard Kouchner est l'invité du matin. Il évoque Srebrenica, dix ans après. Il semble gêné lorsque le journaliste évoque le rôle de la France lors de ce massacre. Je ne me doute pas encore que la faillite de l'Europe me guidera vers Avignon.


19h à la Salle Benoît 12. J'attends pour « The Biography Remix »  de Michael Laub. Cette pièce retrace la vie de Marina Abramovic, artiste Serbe, pionnière du « body art » qui consiste à repousser les frontières physiques et mentales.  Je ne connais rien de cette artiste et peu sur le Théâtre ? Performance. Le spectacle commence avec du retard. J'échange avec un groupe de jeunes sur les pièces du moment. Ils ont aimé « l'Histoire des larmes » de Jan Fabre ; en réponse, je les invite à aller voir Olivier Py. Je ressens un fossé générationnel (ils semblent plus attirés par la forme que par le fond).

Je rentre dans la salle. Une comédienne sur scène tient deux serpents (voir la photo). Ma phobie est forte, je crains de m'évanouir et de ne pas pouvoir rester. Je choisis de m'asseoir à côté d'une femme à l'attitude protectrice.

Le spectacle commence. Une série de performances illustrent la vie de Marina Abramovic. Je suis stupéfait par cette créativité ; la scène ou 6 couples se donnent des gifles  me fascine. La danse d'une grosse femme m'épate ; petit à petit, je découvre cet art si peu connu en France et je reconnais une vidéo passée sur ARTE ou  Marina Abramovic mange un oignon. Et puis, il y a cette séquence vidéo où  Marina et son compagnon se rejoignent sur la Muraille de Chine après une longue marche chacun de leur côté. Ces retrouvailles sont en fait une (ré)séparation. Plus la biographie avance, plus je pense à Srebrenica alors que la guerre en Serbie n'est même pas évoqué. Tout s’enchevêtre; je relie tout sans pour autant produire du sens.

Marina apparaît sur scène. S'affiche « 11 juillet 2005 Avignon » sur un écran électronique, signifiant la fin de sa biographie ; a ce moment là, elle nous adresse un sourire. La salle le lui rend bien par des applaudissements chaleureux. Je suis conquis et aimant.

 

A lire le bilan du Tadorne sur le festival d’Avignon 2005.

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L’OVNI Jan Decorte au Festival d’Avignon!

Il est 14h30, sous un soleil de plomb (ne comptez pas sur le Festival d’Avignon pour protéger son cher public…alors que les attachés de presse sont tranquillement à l’intérieur, au frais…) ;  j’attends pour « Dieu et les esprits vivants » de Jan Decorte. C’est un artiste inconnu en France et les attentes sont fortes pour la critique et le public. Une dame s’approche de moi ; Libération et son cahier spécial sur la scène flamande est introuvable sur Avignon. Je lui promets de lui donner; elle me propose de boire un verre avec elle à la fin du spectacle. Avignon débute !!

Que dire de ce premier spectacle ? C’est un OVNI…Je ne sais pas ce que j’ai vu ! Seul le moment avec Anne Teresa de Keersmaeker (photo ci-dessous; une vieille connaissance !) et la musique d’Arno donnent à ce spectacle sa raison d’être. Pour le reste, la poésie de Jan Decorte est desservie par une mise en scène minimaliste ….Je sors de ce spectacle dérouté ; seul  le verre offert par Sylvie Ferré me redonnera confiance quand elle me parle de Jan Fabre et de l’Art Performance !

 

A lire le bilan du Tadorne sur le festival d’Avignon 2005.

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Jan Fabre et “l’histoire des larmes”: le rendez-vous manqué.


Je quitte Villeneuve pour le Palais des Papes (avouez que cela fait un peu chic, non ?) pour « L’histoire des larmes », par Jan Fabre. Je tente un jeu de mots… « Une pièce à pleurer » ! Où est donc le sens ? Suffit-il de faire du bruit sur scène pour se faire entendre ? A quoi sert-il de répéter les mêmes phrases (« l’urine, les larmes, la sueur ») si ce n’est pour masquer la pauvreté du texte. Il y a certes quelques beaux moments (notamment quand les danseurs enveloppe les parties de leur corps de larmes de verre). Et pourtant, n’y avait-il pas matière à étonner, détonner, quand on sait le poids de l’Eglise pour avoir au fil des siècles rejeter toutes les sécrétions de nos corps ? N’y avait-il pas un sujet porteur quand on connaît le poids des médias pour orienter nos larmes, via nos peurs ? Au lieu de tout cela, un « son et lumière » minimal pour une histoire bâclée, truffée de bons gags et accompagnée d’une chorégraphie aussi pauvre que les larmes du MEDEF lors d’un licenciement économique!

J’ai eu envie de pisser tout au long du spectacle à défaut de pleurer d’émotions. Etait-ce l’effet recherché ?

 

0h30. Je file vers Aix en pilotage automatique. J’ai coupé le son de la radio et toute la luminosité pour me laisser bercer par le doux ronronnement du moteur. Je m’imagine dans un avion avec des passagers dormant tranquillement à l’arrière. Je ressens le besoin de douceur après cette journée si étrange en Avignon. J’ai besoin de retrouver mes sens de peur de les avoir perdu.


 

A lire le bilan du Tadorne sur le festival d’Avignon 2005.

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« Le cas de Sophie K. » de Jean-François Peyret: un cas d’école?

Je file à La Chartreuse de Villeneuve lez Avignon. J’adore ce lieu, propice à la réflexion et à la culture. Je m’arrête à la librairie. Les ouvrages d’Olivier Py sont en bonne place mais je n’achète rien…comme si Jan Decorte m’influençait sur ce choix littéraire ! Ne me demandez pas pourquoi, j’ai rendez-vous avec ma psychanalyste mardi !


« Le cas de Sophie K. » débute avec un décor minimaliste (un piano, des ordinateurs et un canapé). Jean- François Pêyret et Luc Steels ont voulu nous raconter l’histoire de la mathématicienne, romancière, critique dramatique et révolutionnaire féministe Sophie Kovalevskaïa. La mise en scène est incroyablement raffinée : la projection d’images en direct par l’utilisation d’une caméra vidéo puis numérique nous permet d’appréhender toute la complexité du personnage de Sophie K à travers 3 comédiennes, dont Nathalie Richard, magnifique (repérée pour ma part dans le film, « la confusion des genres » ).

Malgré tout ce raffinement, je ne ressens par la puissance de Sophie K. Suis-je envahi par ces nouvelles technologies qui font perdre à la pièce la communication circulaire entre les personnages ?


Dates à venir:

Paris du 06/04/2006 au 27/05/2006

http://www.colline.fr

Théâtre national de la Colline

 

A lire le bilan du Tadorne sur le festival d’Avignon 2005.

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Anne Teresa de Keersmaeker: la désunion…


Dimanche 2 juillet ; Marseille;  22h…J’ai rendez-vous avec Anne Teresa de Keersmaeker. Cela se voit…D’un pas décidé, j’arpente le parc Henri Fabre, heureux de commencer mon périple festivalier et de retrouver l’univers complexe de cette chorégraphe. Elle  a toujours eu le talent de relier avec humour ce qui s’oppose. J’ai besoin de relliance au moment où la France s’enferme dans les oppositions, où tout semble se cliver si vite.
Soudain, sur le chemin qui me menait vers l’entrée, je rencontre A. (une connaissance professionnelle) et son amie. Elles souhaitent vendre leur place au regard de leur immense déception après la prestation du "Nederlands Dans Theater" . La danse doit être dansée et les passerelles vers la vidéo ont visiblement perturbées mes interlocutrices ! Je décide donc de les dissuader et de faire connaissance avec Anne Teresa de Keersmaeker,  au langage chorégraphique si particulier! Cet aparté avant le spectacle me met dans un drôle d’état d’esprit…Quel est le public de ce festival ? Que vient-il chercher ? Soudain me revient la pièce de Jérôme Bel (« The show must go on ») jouée au théâtre des Salins à Martigues l’hiver dernier. Il avait interrogé, avec brutalité, ce rapport entre le public et les artistes. Mais je m’égare…quoique…
Installé, je me retrouve entouré de personnes qui manifestement se connaissent professionnellement J’apprends, au détour d’une conversation, que leur entreprise est mécène du festival…Je crains le pire….Mais pourquoi viennent-ils voir Anne… ??

« Raga for the Rainy Season » commence. Sur une musique d’un raga indien, me voilà hypnotisé pendant 60 minutes, où 9 danseurs (dont un homme) accompagnent cette musique si étrangère à nos oreilles d’occidentaux. Les mouvements sont chaotiques, désordonnés et en même temps construits. Tout nous invite à relier, à avoir l’œil sur cette immense scène, à suivre avec enchantement le jeu des danseurs avec leur jupe blanche. Je m’étonne de me laisser aller à ce point même si je ne ressens paradoxalement que peu d’émotions. Anne Teresa de Keermaeker a créée une œuvre beaucoup plus hermétique, moins légère car elle interroge notre aptitude à nous laisser porter par le chaos.

D’Inde, nous sommes projeté dans l’univers du Jazz de John Coltrane pour le deuxième spectacle (« A love supreme »). 4 danseurs toujours en blanc; deux hommes, deux femmes. Un homme, grand et svelte, illumine ce spectacle par sa force et la complexité de ses mouvements…Il est le Jazz ! Les 3 autres ne ressentent pas la puissance de cette musique et cela se voit. J’assiste à un quartet en perte progressive de vitesse où chacun fait sa performance, comme dans un spectacle de hip hop.

Le public applaudit mollement, déboussolé par ces deux univers si éloignés. J’ai le sentiment qu’au lieu de se compléter, ces deux spectacles s’annulent ou s’opposent (les réactions du public à la sortie étaient éloquentes : « lequel des deux as-tu préféré ? »).

Mais le contexte a joué. Ces deux pièces étaient – elles adaptées au festival de Marseille et à son public ? Que vient-il chercher alors que mes voisins ont fait preuve tout au long du spectacle de leur mauvaise humeur…et de leur irrespect envers une œuvre artistique.

Que vient chercher ce public ?

Je ne revois pas A. et son amie. Satisfaites ou remboursées ?