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FESTIVAL D'AVIGNON OEUVRES MAJEURES

Angelica L.

Ce texte est un poème dédié à Angelica Liddell pour son spectacle « La casa de la fuerza » qui a bouleversé tant de festivaliers. Il est à mettre en lien avec la critique de Pascal Bély. Ce texte est un cadeau. Au théâtre, à Angelica. A nous.

Angelica, on a envie de l’appeler Angelica L, comme on dit de Marguerite D. ou de toute héroïne.
Angelica L. est héroïque.
Elle incarne la Douleur, et la Douleur l’incarne.
Sa douleur rejoint celle de toutes les femmes.
Elle est corps décharné, bras ouvert jusqu’à la souffrance du Christ.
Par son sang elle se souvient de Gina Pane des années 1968;
 
Son sang coule des genoux de son Christ.
De sa douleur, elle a les clous de sa scarification, elle saigne de sa douleur, on lui prend son sang avec un tel plaisir qu’elle l’offre ensuite avec un grand sourire.
Elle déverse sur la blancheur de son linceul, le rouge de ses veines.
 
L’avion passe avec un enfant, le voyage ainsi commence.
Cinq heures à les voir chanter, danser, parler, c’est cinq heures comme cinq minutes, c’est cinquante  années de cris, c’est ainsi,  le long voyage de sa vie.
 
Aimer à ce point pour mourir toute seule, faire sa toilette de son corps avec des citrons, se mutiler jusqu’au plaisir de la douleur, elle se sent comme une merde, sa solitude est un scandale.
Elle continue, néanmoins à manger du Tiramisu…
 
Être pute ou mourir, on installe les canapés d’une manière inversement logique, on fait la course jusqu’à l’étouffement, on enterre l’autre sous le charbon, on l’étale, on l’enlève…
Angelica éclate de douleur, se déchire et nous attache. Elle  est  regardée, on la respire, elle nous attache encore plus et on devient son intérieur.
On se sent liquéfié puis  absorbé par son corps et par ce qu’elle dégueule.
Son histoire devient une histoire immense….ses soeurs-femmes l’accompagnent et vivent la douleur des autres.
On est fatigué, le corps a du mal à suivre, on est avec elles toutes, ces femmes, ces soeurs, ses frères de déchirement.
On est dans la stupeur, on veut que cela continue encore jusqu’à demain, encore, toujours, le temps ne  compte pas, il passe et on ne s’en doute pas.
Jan Fabre  nie l’histoire individuelle, Angelica L nous impose le contraire. Elle passe avant  tout le monde. Elle est l’exemple.
 
Des musiques pop aux paroles effrayantes, un violoncelle et des fleurs, un moment inouï comme posé là, hors du temps. Avec des fleurs, Brel et Elvis, des images à la Pina (encore-toujours), la lenteur de l’amour, je te cajole, je t’aime, calme et volupté, les petits canapés de Gulliver, la force du Culturiste, tiens je renverse la voiture, je suis un mec moi !!!!
 
Comment sortir de là, épuisé, éreinté dans un bonheur inouï de grâce et de suspension.
 
L’autre soir, l’Espagne a gagné…Elle l’a appris, elle a hurlé de bonheur, sautillant comme une enfant, tellement heureuse.
La douleur d’Angelica était cicatrisée, et nous, nous étions meurtris de bonheur.

Francis Braun – www.festivalier.net. 

A lire la critique de Pascal Bély en Français et en Espagnol.

“La casa de la fuerza” d’Angélica Liddell au Festival d’Avignon du 10 au 13 juillet 2010.

 

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EN COURS DE REFORMATAGE

Para Angélica Liddel.

Las 3h30 de la mañana. Los espectadores ya no tienen mucha fuerza después cinco horas de esta obra de arte pictural, de un teatro coreográfico, agotados por tantas solicitaciones  visuales, auditivas e incluso olfactivas. « La casa de la fuerza » de la española AngélicaLiddel es un puñetazo, que nos precipita dentro de la crisis, la que habíamos olividado demasiado pronto.

Salvo que el teatro está aquí para reavivar las heridas porque todos somos hechos de esta materia. Esta noche, en el Cloître des Carmes, actores y espectadores están infínamente, intímamente ligados a todas estas « pequeñas historias » de cuyas hicimos todos grandes : el desamor, el malestar, el abandono, la renuncia de sí mismo? Llamemos esto como queramos. Es nuestro infierno común. La verdadera crisis es esta. La económica? solo es económica? ya está bien, ya basta. ¡Basta de discursos ! Demos paso a la verdad. Al cuerpo.

Son tres mujeres, seís destinos. Busquemos el error en la suma. A diferencia de algunos hombres que están siempre listos para defender causas humanitarias pero que maltratan a sus parejas, éstas tres mujeres depresivas en el primer acto invitan a otras tres en el último, para evocar la situación de la condición feminina en México. Todo está relacionado. Nuestros desamores se inscriben también dentro de un contexto social.

Pero tambíen porque ser una mujer pegada, violada y matada en otro lugar es una pena de amor para toda la humanidad.

Tres actos par (re)vivir  desde dentro lo que hemos querido todos gritar fuera. Porque el mal de amor, la separación alcanzan su paroxismo en el sufrimiento del cuerpo. ¿Cómo presentar en el teatro lo que suele estar meta por las óperas, los bailes, los cuentos para no dormir ? Aquí todo está convocado.

El texto, poderoso, porque está hecho de palabras de una ternura desnuda ;

la música, omnipresente, repetida (de Bach y de la pop), porque sin ella, quizás no noshubiéramos sobrevivido al náufrago del alma y que tumbados, Bach, Brel y Barbara fueran nuestros analistas punto por punto ;

el líquido, porque desborda y que el amor siempre termina tomando el agua ;

la sangre, porque sangramos de nuestras venas par sacarnos de este follón ;

sofás, mucho sofás, un ejército de sofás porque son nuestras camas de niños con o sin barrotes, depende? ;

flores, en ramos para estrellar lo que queda de bonito ; en macetas para adornar los cementeros ; en capullos, para volver a nacer ;

un inmenso cubo de pasta de modelar para esculpir, dar a luz a un ejército de muñecos fabricado de ternura y de pereza, todo para resistir a la estúpidez machista ;

el tiramisú? porque con Angélica Liddel es el único pastel que nos pone en pie cantando ;

el carbón, sí el carbón, para cavar la tumba, agotar el cuerpo, caer en el fondo del hoyo y provocar el efecto teatral más magistral que hemos podido ver, un golpe de grisú a la cabeza a que siguen hartándonos con sus clasificaciones (teatro, baile y companía).

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Todas estas materias modelan la dirección y « La casa de la fuerza » trastorna una parte del público : los cuerpos se funden dentro de los objetos y les dan un alma, la música se adapta a las materias y acabamos pasmodos, inmovilizados, por tanta orgía de tolerencia y de belleza. Porque aquí, el cuerpo no está manipulado, como un objeto para crear un propósito, sino que está atravesado para que nos acordemos, como una exigencia de verdad. El cuerpo del actor es una donación al público, un vínculo de amor comprometido y que compromete donde se convoca una enfermera sobre en escenario para extraer su propria sangre y manchar su camisa. « Soy sangre ». « La casa de la fuerza » será uno de los momentos más grandes de la historia del festival de Avignon. Porque Angélica Liddel no se conforma con mirar caer a los hombres. Les ofrece la fuerza de su dirección para que « Ne me quitte pas » sea un himno a la alegría.

Pascal Bély – www.festivalier.net. Gracias por la traduction Elsa Gomis.  

“La casa de la fuerza” d’Angélica Liddell au Festival d’Avignon du 10 au 13 juillet 2010.

Credit photo: Christophe Raynaud de Lage

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FESTIVAL D'AVIGNON

Au Festival Off d’Avignon, aux pères et caetera.

Le nom du père, avec une rare constance depuis des lustres, se transmet de père en fils. Le fils lui-même, dans une égale logique de tragédie, devenant père.
Le tout s’orchestrant en fautes majeures et chacun fera, c’est dit, mieux que le précédent lorsqu’il endossera le costume. Que les fratries s’en mêlent et le drame prend de l’ampleur. La mère, de sa noble et malheureuse double place, regardant la scène en attendant la fin…inéluctablement…
Tout ça vous dit quelque chose?
Deux pièces du off vous proposent d’aller vous délecter du goût d’hier, ou d’aujourd’hui, à voir avec nos histoires de famille.

« Les langues paternelles » par le collectif De Facto vous démarre la visite au moment de la mort du père. Le registre, même s’il est là de famille juive, explore toute la gamme des émotions traversantes où chacun aura une occasion de se retrouver, voire de se rencontrer. Une très belle scénographie inscrivant le déroulement de la pièce et le poids des mots portés avec intelligence et justesse par les acteurs. Le jeu, bien habité prend parfois un rythme qui s’emballe…un peu trop? Quoique… si je me souviens de mes histoires familiales, ça devait s’emballer tout autant pour bien peser sa livre? Le texte est beau, bien vu et on est touchés de se rencontrer souvent au coin des mots.

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« Récits de table » de Marielle Rémy et Guillaume Servelly vous invite à la version repas. Celui du dimanche ou des grands jours avec entrée, deuxième entrée, plat et dessert. Celui du quotidien avec le plat mitonné, la conserve ou la soupe? Bref, tous ces repas en famille où la table est le lieu de tous les découpages de chairs. Là encore, la scénographie est belle, les scénaristes comédiens sont très bons comme dans les deux premières pièces de la trilogie. Leur inventivité à dessiner les espaces avec trois fois rien est ici encore parfaite. Le fait de donner vie aux hommes et femmes de trois générations marque joliment l’idée que tout un chacun, dans le jeu des transmissions, navigue et se débrouille avec avoir été, être et devenir. La question de qui ouvre ou coupe le chemin, restant le n?ud de vipère.
On croise dans ces deux créations bien des moments connus ou reconnus, ceux là amenés avec subtilité et espace pour le sourire, le rire, la tendresse ou l’émotion. Le plaisir de réentendre que nous ne sommes pas uniques dans nos histoires de familles dédramatisant les flashs, parfois amers, de nos mémoires.

Bernard Gaurier – www.festivalier.net

« Les langues paternelles » par le collectif De Facto au Théâtre des Doms à Avignon du 7 au 27 juillet.
« Récits de table » de Marielle Rémy et Guillaume Servelly au Théâtre Girasole jusqu’au 31 juillet.