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EN COURS DE REFORMATAGE

A Aix en Provence, la danse défie les bouchons.

La résistance est là, au coin de la rue. La créativité aussi. Pendant que la Mairie UMP d’Aix en Provence organise « la fête des déplacements » pour nous faire croire qu’elle est à la pointe du développement durable, le cours Mirabeau est bloqué par un embouteillage monstre où paradent les 4×4 bling-bling. Alors que le haut du Cours fait la fête, le bas continue de circuler en bagnole comme si de rien n’était, à l’image d’une municipalité UMP qui ne voit pas plus loin que le bout de l’événementiel.
Soudain, l’imprévisible surgit. Le chorégraphe Bernard Menaut et sa troupe viennent perturber ce non-sens pour introduire du sens, de l’humain, de la poésie. Deux danseurs et trois musiciens endimanchés se déplacent dans une course folle avec des chaises de bureau et provoquent une bien jolie pagaille sur le Cours bouchonné. Des insultes fusent de la part de conducteurs pris à leur propre piège. À cinq, ils ridiculisent nos comportements individualistes. Les corps sont cassants, rigides, mécaniques. C’est totalement absurde, mais le miroir est saisissant : les deux voies de la rue sont à l’image des deux hémisphères de notre cerveau de conducteur!
Pendant que les musiciens (magnifiques) jouent avec leurs sons chaotiques, les deux danseurs paradent, se déplacent sur un bout de trottoir. Les corps sont tout à la fois pont-bascule, rue étroite, et boulevard. Dès que la voie est libre, l’absurde en profite pour s’y glisser. Ce n’est pas seulement drôle. C’est beau et notre imaginaire se régale d’autant plus que certains spectateurs sont mis à contribution. En les intégrant, le groupe fluidifie les liens, les mouvements se font plus harmonieux. À la mécanique des premiers gestes, surgissent la ronde, le train : l’énergie de nos déplacements se trouve dans ce lien solidaire et créatif. Bernard Menaut et sa troupe incarne alors les valeurs du développement durable.
La danse réussit là où l’événementiel échoue : nous faire voir autrement ce que nous réduisons pour ne pas changer.


Pascal Bély – www.festivalier.net

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